© sofuckigblessed
Oak, au choix.

« C'est une blague ? » Silence à l'autre bout du fil. Je me redresse, attrape le combiné avec l'autre main et le dépose contre mon oreille gauche. Ma petite sœur - en réalité elle est ma cousine mais ses parents m'ont adopté à la mort de mes parents quand j'avais sept ans - éclate de son rire cristallin, je sais bien qu'elle imagine parfaitement la tête que j'ai en cet instant précis, bien qu'elle se trouve à des centaines de kilomètres de moi. Je ne sais même pas ce qu'elle fait en ce moment ; selon les dires de sa - notre - mère, elle s'est installée à Los Angeles avec sa conquête du moment et essaie toujours de percer dans une carrière d'actrice. « Delweet-Oak, t'es toujours là ? fait-elle avec un rire quelque peu pincé, comme si elle se retenait de se foutre de moi. Maman savait que tu aurais cette réaction. » Nouveau silence, je rechange d'oreille. « Hmm-hmm. » Je grogne en répondant à sa première question, éludant sciemment le restant de son assertion. « Vraiment ? Et qu'est-ce que devient ton charmant... ? » Elle pouffe. J'ai l'impression d'être retourné en arrière, un bond de cinq ans en arrière, quand elle n'avait encore que dix-sept ans. « Miguel ? Oh, tu sais... » J'attends la suite. Qui ne vient pas. « Non, je ne sais pas, soufflé-je en la poussant ainsi à poursuivre son récit. Susan m'a dit que tu t'étais installée avec lui, je pensais que c'était sérieux. » Cette fois, elle a fini de rire et pousse un grognement mécontent qui ressemble beaucoup aux miens. Comme quoi, les habitudes de famille ne se perdent pas dans la distance. « Hum, je ne savais pas que ton école de police t'apprenait à fliquer les relations. » Elle pousse un soupir, laisse passer quelques secondes. « Je pensais que ça te ferait plaisir. » Je grimace, navré qu'elle me sorte un argument de la sorte. Si j'appréciais la nouvelle à sa juste valeur ? Certainement pas, mais la surprise m'empêchait de m'en réjouir. « Je le suis. C'est juste... je commence en me levant du canapé où je suis installé depuis le début de notre conversation. Tu sais, Albuquerque, ce n'est pas Los Angeles. Je veux dire par là que peu d'actrices sont découvertes par ici. » J'entends un souffle qui témoigne du sourire qui fend son visage à cet instant ; je le devine sans le voir, ce beau sourire rayonnant. Alors, poussant par cet élan, je poursuis. « Qu'est-ce que quelqu'un comme toi viendrait faire ici ? » Elle semble réfléchir, mais la réponse arrive très rapidement. « Je boirai des mojitos et draguerai les hispaniques ! » Elle paraît fière de sa répartie et éclate du même rire qu'en début de notre conversation. Je capitule, j'abandonne, elle a gagné. Elle veut venir vivre avec moi ? D'accord. « A quelle heure arrive ton avion ? » Elle pousse un cri de victoire, m'assénant des invectives insignifiantes, mais touchant mon orgueil de grand frère trop faible pour lutter contre elle. « Il faut néanmoins que je t'explique deux ou trois choses : nous ne sommes pas au Mexique, ici. C'est toujours les Etats-Unis, tu sais... » Mais, déjà, elle ne m'écoute plus. Je parie qu'elle est occupée à faire ses valises.